Le pouvoir et ses souteneurs ce jeudi 29 avril 2021 lorsque le conseil d’administration du Fonds monétaire international a annoncé un appui financier de 350 milliards de francs pour soutenir la riposte des autorités face à la crise sanitaire et pour la promotion de la relance de l’économie. Les communicateurs du régime ont tôt fait de saluer les performances managériales du Sénégal du président Macky Sall pour expliquer l’obtention de cette manne financière. Bien évidemment, les confrères n’ont pas été en reste dans ce chœur de glorifications. Pourtant, ce qui se cache en réalité derrière un tel soutien, c’est une amère soupe puisque le Sénégal risque une mise sous ajustement du FMI et de la Banque mondiale. Eh oui, un ajustement structurel !

Les autorités ont jubilé à l’annonce des 350 milliards de francs obtenus du FMI. C’est de l’irresponsabilité. Un manque de sérieux notoire de la classe politique dirigeante de notre pays ». Notre interlocuteur, très au fait des questions économiques, est réellement abasourdi par la manière dont cet accord a été accueilli dans notre pays, particulièrement du côté du pouvoir.

« Le Sénégal va tout simplement renouer avec la mise sous ajustement du FMI et de la Banque mondiale » indique cet économiste chevronné. Son manque d’enthousiasme s’explique par le fait que notre pays frôle désormais, avec un endettement représentant 70 % du Pib (Produit intérieur brut), le seuil fixé par l’Union économique monétaire ouest-africaine (UEMOA).

Le niveau d’endettement de notre pays monte actuellement à 9171 milliards de francs environ, soit un taux d’endettement tournant entre 67 à 68 %. On frôle presque la limite fixée par les institutions communautaires ! Or, lorsque le Sénégal arrivera à 70 % d’endettement, sa note va être dégradée au niveau des agences de notation, ce qui va impacter négativement sur sa réputation au niveau des marchés internationaux.

Le seul recours pour obtenir de l’argent va alors être constitué par les institutions de Bretton Woods (FMI et Banque mondiale). Ce qui serait un recul sans précédent puisque sous le magistère de Me Abdoulaye Wade, notre pays avait fini de se passer de l’argent du FMI. Le Sénégal, avec l’instrument de suivi de la politique économique (ISPE), avait un programme de surveillance sans décaissement puisque sous notre niveau d’endettement tournait entre 30 à 40 % après que les compteurs avaient été remis à zéro.

Le Fmi se contentait tout simplement tous les six mois de passer en revue la gestion macro-économique de notre pays. La situation s’est depuis lors terriblement détériorée. « Le nouvel accord de financement, au titre duquel le Sénégal demande accès à 453 millions de DTS (soit 140 % de sa quote-part au FMI, environ 650 millions de dollars ou 350 milliards de francs CFA), contribuera à soutenir la riposte des autorités face à la crise sanitaire et à promouvoir la relance de l’économie. Il s’appuiera sur les objectifs de réforme du programme ICPE en cours et sera exécuté parallèlement à ce dernier » lit-on dans le communiqué officiel publié par le FMI en date du 29 avril dernier.

Seulement ce discours officiel ne renseigne guère sur la contrepartie imposée par le FMI au Sénégal pour décaisser un tel montant astronomique de soutien à notre économie. Le FMI a exigé bel et bien une contrepartie, c’est-à-dire d’avoir une exigence et un droit de regard dans le comment cette manne financière sera utilisée.

Le Sénégal retourne aux mains du FMI…après s’en être échappé !
La situation décrite par les experts est catastrophique puisque notre pays risque tout simplement de retourner entre les mains du FMI. « Les ajustements vont reprendre parce que le rythme d’endettement qui frôle les 70 % fera que les acteurs du marché n’auront plus confiance au Sénégal. Ou, alors, lui imposeront des taux d’intérêts élevés. Notre seul recours restera le FMI et la Banque mondiale. Le Sénégal perd son autonomie puisqu’il sera obligé par les institutions de Bretton Woods, qui donnent une dette liée, de passer sous leurs fourches caudines. Autrement dit, pas de carte blanche pour l’utilisation de l’argent. Ces institutions imposent alors là où l’argent qu’elles vous donnent doit être investi » souligne notre interlocuteur.

Cette situation inédite découle tout simplement de la mauvaise orientation de notre économie sous l’ère Macky Sall. « De 2014 à 2020, le régime de Macky Sall s’est beaucoup orienté vers des prêts massifs pour des investissements publics. Chaque année, Macky Sall empruntait près de 1000 milliards de francs sur les marchés pour des investissements irresponsables. Comment peut-on mettre près de 1000 milliards de frs dans le TER qui est resté presque pendant cinq ans sans rouler ? Et, donc, sans produire de recettes alors qu’il faut rembourser les échéances. Les choses prennent une tournure de sabotage, d’irresponsabilité notoire permettant au FMI de revenir comme sapeur-pompier ou pompier pyromane. C’est désolant et triste » rage notre interlocuteur.

Le Sénégal a été, en 1984, le premier pays subsaharien à avoir connu l’ajustement structurel. Notre pays était placé sous le diktat du FMI et de la Banque mondiale jusqu’en 1998 puisque notre pays était lié avec ces institutions par des Programmes d’ajustement structurel structurés en des Facilités d’ajustement structurel renforcé (FASR). Un vrai recul. Il convient aussi, in fine, de se demander qu’est-ce qui a été fait des 240 milliards de francs encaissés par notre pays et représentant la totalité de ses Dts (droits de tirage spéciaux) ?

Cela avait été une manière pour le FMI de soutenir tous les pays impactés sur les plans sanitaire et économique par la pandémie de coronavirus. A ce titre, donc, le Sénégal avait reçu 240 milliards en avril 2020. Un an plus tard, le FMI lui prête 350 milliards. Le Gouvernement a-t-il déjà soldé les 240 milliards des Dts reçus l’année dernière ? On aimerait bien qu’ l’on éclaire notre lanterne sur ce point, rapporte Le Témoin.